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Deux semaines ont passé sur l’incendie de Chalais. Tandis qu’autour de lui la nature refleurit et verdoie, il est malaisé à quiconque l’a traversé dans quelque belle journée d’été, de reconnaître dans ce vaste amas de ruines, l’emplacement où, autrefois, dans un pittoresque désordre, à l’ombre des pampres et des noyers, se pressaient, toutes festonnées de vignes, ses vieilles habitations coupées de ruelles irrégulières, tout un ensemble de vétusté, auquel des treilles épaisses arrondies en forme de voûtes, donnaient un cachet méridional qui saisissait agréablement la vue.



Il a suffi de quelques heures pour effacer la physionomie paisible du vieux village, et cela au point qu’au lendemain du désastre, quelques-uns des sinistrés hésitaient à démêler dans le brasier fumant, les restes de leurs propres foyers.



Mais il faut se hâter de le dire, l’attitude courageusement résignée de ces pauvres gens est au-dessus de tout éloge, et frappe dès l’abord tout ceux que la compassion ou une simple curiosité pousse à visiter le lieu de la catastrophe.

 

Tous sont dignes et résolus. Personne ne prend occasion de son malheur pour demander l’aumône, et l’étranger peut circuler au milieu des décombres sans que nul ne l’importune par des lamentations ou des murmures ; on n’entend aucune plainte. A la première stupeur causée par le coup de foudre, l’effondrement du chez-soi, a succédé presque sans transition à celle que produit la surprise de bienfaits inespérés.

 

La gratitude pour la promptitude et l’abondance des secours déborde de toutes les lèvres, aussi les généreux donateurs peuvent, d’ores et déjà, être assurés qu’ils n’ont point affaire à des ingrats.



L’élan provoqué par le sinistre de Chalais a été unanime et spontané. De partout on s’est empressé de parer aux premiers besoins. Vivres et vêtements ont afflué, aussi le jour de Pâques, la population tout entière décemment vêtue, a pu, la reconnaissance au cœur, célébrer le retour de la bonne fête.

 

Dans cet admirable concours de sympathies arrivant à point nommé de tant de lieux divers, on ne sait ce qu’il faut admirer, la générosité ou l’ingéniosité des secours. Il y en avait même de candides, d’enfantins, à preuve une belle poupée aux cheveux blonds qu’une petite fille anonyme envoyait au Comité cantonal, pour être remise à une fillette de son âge, avec la recommandation écrite de « bien la soigner ». Bénis soit les parents qui élèvent leurs enfants dans de tels sentiments de charité !



Au nombre de ces touchants témoignages de solidarité nationale, il en est un qu’on ne peut omettre de citer : l’envoi de cent onze francs, produit d’une collecte des habitants de Meyeingen, qui après avoir envoyé leur offrandes aux sinistrés de Sevelen, se sont encore cotisés pour venir en aide aux incendiés de Chalais, leurs frères en détresse.



De tels faits sont bons à enregistrer. Un pour tout, tous pour un. A l’honneur du peuple suisse, la vieille devise n’est pas près d’être morte.



Après le désarroi de la première heure, les gens de Chalais se sont peu à peu casés, - entassés, serait mieux dit, mais personne n’est sans abri, - les uns chez les parents, voisins ou amis que le feu a épargné ; les autres dans les villages d’alentour, plusieurs dans la maison communale.

 

Il en résulte que parfois quelques familles partagent la même cuisine, où tour à tour chaque ménage fait cuire ses repas. Le Valaisan n’est pas blasé par le confort, il a peu de besoins et s’accommode facilement de tout. Au début, ustensiles et objets de première nécessité faisant absolument défaut, ces braves gens réduits à faire la cuisine en plein aire, sans fourchettes ni couteaux, devaient y suppléer à la manière des Turcs, avec leurs doigts, et de l’un à l’autre se passer la cuillère.

 

Aujourd’hui, grâce à l’heureuse inspiration d’un donateur de Lausanne, qui leur a adressé deux caisses de vaisselle, chacun est pourvu d’une assiette. Il serait toutefois désirable que d’autres envois du même genre, faïence ou batterie de cuisine, vinssent suppléer aux ustensiles, qui ont été la proie des flammes, car il ne faut pas oublier que plusieurs familles n’ont, à l’exception du bétail, absolument rien pu sauver de leur mobilier.



Comme nous l’avons dit plus haut, les vêtements abondent ; les chaussures aussi. Ce qui maintenant serait le plus urgent et le mieux venu, devrait être de la literie, couvertures, paillasses, draps, linges, etc.., tous articles que les incendiés ne peuvent penser à se procurer, faute de ressources. Des outils aratoires, des denrées, pommes de terre et semences, ainsi que des envois de fourrage ne pourraient arriver plus à propos.


    Gazette du Valais 1892